Limoges, un soir de juillet, dans l’église Saint-Michel-des-Lions. Venant du fond de l’édifice, les chanteurs du Jeune Chœur grégorien, en aube ou en coule, entonnent de leurs voix claires un Lux iucunda (Lumière joyeuse) en traversant la nef, et viennent s’installer en demi-cercle devant un massif autel tombeau en marbre. L’abbé Henry de Prémare, tout jeune prêtre ordonné dix jours auparavant à Paris, attrape un micro et annonce le thème de la soirée : Veni Sancte Spiritus. « Ce soir, nous allons chercher l’Esprit Saint, lance-t-il à l’assemblée. L’Esprit Saint qui est insaisissable et qui souffle où Il veut. »
De nouveau, les voix pures s’élèvent en volutes parmi les colonnes de cette très belle église du XVIe siècle. Défilent un Ave Maria, un Veni Sancte Spiritu, un étonnant Veni Creatorpolyphonique (seul dans son genre), jusqu’au triomphant Te Deum final, hymne de victoire, de louange et de grâce. En prime, ceux qui ont eu la bonne idée de rester après la fin du concert auront droit à un bis improvisé : un Christus vincit ! vigoureux et martial. Le chant vient du fond des âges : « Il a été chanté lors du sacre de Charlemagne », explique Anne Guyard, l’un des piliers de cette Route grégorienne.
La Route grégorienne, semaine annuelle de marche et de concerts, a été lancée il y a deux ans par l’abbé Guillaume Antoine, robuste Lorrain barbu au regard clair et aux mini-lunettes rondes, incardiné dans le diocèse de Coutances (Manche). Il en résume l’esprit : « Des liturgies magnifiques dans des lieux inspirants avec des chants superbes et une équipe sympathique ! » La jeune chef de chœur Anne Guyard, traits fins et sourire facile, est à ses côtés : « La Route grégorienne s’adresse à des étudiants et jeunes professionnels, entre 18 et 35 ans environ, détaille-t-elle. L’idée est de leur faire découvrir le grégorien en les formant au chant et à la liturgie et en donnant des concerts. Et de se laisser bercer par ces divines mélodies… » Partie de l’abbaye de Solignac le 3 juillet, la Route s’est terminée à Saint-Junien (Haute-Vienne) le dimanche suivant, après des étapes à Saint-Léonard de Noblat et Limoges – où une messe a été dite par Mgr Pierre-Antoine Bozo à la cathédrale Saint-Étienne.
Cette année, une trentaine de jeunes avaient répondu à l’appel. Garçons et filles, laïcs pour la plupart, venant d’un peu partout. Des quatre coins de France, mais aussi de Roumanie, de Suède et de Lituanie. Sans compter deux séminaristes de la Communauté Saint-Martin. Une diversité géographique, mais aussi de styles, de pratiques, de sensibilités liturgiques.
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